Boîte à outils du RH en période d’incertitude : analyser, ajuster et rebondir

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Les crises économiques ou les périodes d’incertitude, d’instabilité, mettent les entreprises à rude épreuve, en particulier les PME qui disposent de moins de marges de manœuvre financières que les grands groupes. Face à une baisse d’activité ou à une chute du chiffre d’affaires, la gestion des ressources humaines devient un levier clé pour ajuster les coûts, optimiser l’organisation et préparer la reprise.

Les dirigeants de PME et les DRH peuvent ainsi s’appuyer sur des leviers RH flexibles et efficaces pour ajuster leur masse salariale, rationaliser leur organisation du travail et optimiser leur politique de rémunération.

Voici une boîte à outils détaillée des mesures qu’il est possible d’activer lors de périodes de baisse d’activité, chiffrées et illustrées pour en comprendre les impacts.

Ajuster les effectifs et la masse salariale

La masse salariale représente souvent 30 à 50 % des charges d’une PME. Dans un contexte économique incertain, adapter les effectifs est le premier levier à activer. Attention, cela doit se faire tout en préservant l’engagement des salariés.

Mesures immédiates et temporaires

Avant d’envisager des décisions plus radicales, plusieurs actions permettent d’adapter les effectifs à la baisse d’activité :

  • Non-renouvellement des contrats courts (intérim, CDD)
    • Impact : réduction immédiate des coûts salariaux sans impact juridique.
    • Exemple : une entreprise qui compte 5 intérimaires à 2 500 €/mois économise 12 500 € par mois en ne renouvelant pas ces contrats.
  • Imposition de congés payés et de RTT
    • Impact : réduction du coût de la sous-activité sans licenciements.
    • Exemple : si une entreprise a une masse salariale de 300 000 € par mois pour 30 salariés et qu’ils prennent 10 jours de congés (environ 1/3 du mois), l’entreprise économise l’équivalent de 10 % de la masse salariale sur un mois.
  • Chômage partiel
    • Impact : prise en charge par l’État d’une partie des salaires (en moyenne 72 % du net et 100% pour les salariés au SMIC).
  • Mise à disposition de personnel
    • Impact : prêt temporaire de salariés à une autre entreprise, évitant les licenciements. Les prêts sont faits à “prix coûtant” pour une période définie.
    • Exemple : une PME en sous-activité peut prêter 5 salariés à une entreprise en besoin, économisant ainsi ces coûts salariaux pendant la période.

 

Ajustements structurels

Si la période d’incertitude se prolonge, les mesures temporaires peuvent ne plus suffire. Il devient alors nécessaire d’adopter des solutions structurelles, qui permettent une adaptation plus profonde et durable aux nouvelles réalités économiques de l’entreprise.

  • Passage à temps partiel négocié
    • Impact : réduction de la masse salariale tout en maintenant l’emploi durant une durée déterminée avec une compensation pour les salariés.
    • Exemple : si 10 salariés passent de 39h à 30h, soit une réduction de 23 % du temps de travail, une entreprise avec une masse salariale moyenne de 35 000 € pour ces 10 salariés économise environ 8 000 €. 
  • Réduction des salaires avec l’accord des employés
    • Impact : permet d’éviter les licenciements en période d’incertitude.
    • Exemple : une baisse de 5 % des salaires pour une PME avec une masse salariale de 500 000 €/mois représente une économie de 25 000 €/mois.
  • Départs négociés
    • Impact : réduction des coûts fixes via des accords individuels, avec un dialogue apaisé et maîtrisé. Moins conflictuel qu’un licenciement, il permet de conserver un bon climat social et de gérer les effectifs avec souplesse.
    • si une entreprise passe de 30 à 20 salariés par des départs négociés, elle réduit ses charges mensuelles de 90 000 € à 60 000 €, moyennant une enveloppe de départs à négocier. Le retour sur investissement peut être réalisé en quelques mois.

 

Optimiser l’organisation du travail

Adapter l’organisation du travail permet de maintenir la compétitivité avec moins de ressources. Une réorganisation efficace permet d’adapter l’activité à la demande tout en limitant les coûts superflus.

Organisation du travail dans une entreprise logisitique

 

Flexibilité du temps de travail

  • Annualisation du temps de travail
    • Impact : ajuster les horaires aux périodes creuses et de forte activité.
    • Exemple : un cycle d’activité avec 39h/semaine en haute saison et 31h/semaine en basse saison permet environ 7 % d’économie sur les charges salariales.
  • Forfait jours
    • Impact : supprimer la référence horaire pour les cadres et optimiser la productivité.
    • Exemple : un cadre payé sur une base de 235 jours travaillés/an au lieu de 218 permet d’optimiser la charge de travail sans hausse salariale.
  • Compte Épargne Temps (CET)
    • Impact : permet de stocker les heures supplémentaires sans les payer immédiatement. Attention toutefois à bien gérer sa trésorerie en cas de départs de salariés.
    • Exemple : un salarié accumulant 20 heures supplémentaires par mois (à un taux horaire de 20€ par heure) dans un CET permet une économie immédiate de 20 % des coûts d’heures supplémentaires.

Repenser la politique de rémunération

Un système de rémunération adapté permet d’impliquer les salariés tout en allégeant les coûts fixes. Il s’agit d’inverser le paradigme pour transformer une contrainte budgétaire en un levier de motivation et de performance.

Introduction d’une rémunération variable

  • Primes sur objectifs plutôt que hausses salariales fixes
    • Impact : transforme une charge fixe en charge variable.
    • Exemple : une PME qui remplace une augmentation de 150 €/mois par une prime annuelle de 1 800 € sous condition de performance économise si l’objectif n’est pas atteint.
  • Suppression des primes obsolètes
    • Impact : réallouer les ressources là où elles sont les plus utiles.
    • Exemple : une entreprise qui supprime une prime de 5 % du salaire mensuel sur 30 salariés économise 7 500 €/mois.

Exonérations sociales et avantages fiscaux

  • Intéressement
    • Impact : rémunération incitative, à impact, exonérée de charges patronales sous conditions. L’entreprise peut choisir de mettre en place des critères à impact positif pour l’intéressement comme la réduction du gaspillage par exemple.
    • Exemple : un intéressement de 1 000 €/salarié coûte 20 % moins cher qu’une prime équivalente en salaire.
  • Plans d’épargne entreprise (PEE) et PERECO
    • Impact : permet aux salariés d’épargner avec des avantages fiscaux.
    • Exemple : un abondement de 1 000 € sur un PEE coûte moins de 800 € à l’entreprise contre 1 300 € en prime classique.

Une politique RH adaptée pour rebondir 

La gestion RH ne se limite pas à la réduction des coûts. Préparer la reprise est tout aussi crucial que gérer la baisse d’activité. Un plan RH stratégique permet de transformer une période difficile en opportunité d’évolution et de renforcement des compétences internes.

  • Investir dans la formation
    • Impact : renforce l’employabilité et la motivation des salariés.
    • Exemple : utiliser les périodes de sous-activité pour former 20 salariés avec un financement OPCO permet de monter en compétences à coût réduit.
  • Audit social et diagnostic RH
    • Impact : identifier les forces et faiblesses pour anticiper la reprise.
  • Dialogue social renforcé
    • Impact : une meilleure communication évite les conflits et facilite les ajustements nécessaires.

Pourquoi faire appel à un RH à temps partagé en temps incertains?

Mettre en place ces mesures nécessite une expertise en droit du travail, en gestion RH et en stratégie d’entreprise. Pour une PME, un RH à temps partagé est une solution agile et économique, permettant d’activer rapidement les bons leviers sans alourdir la structure. C’est un investissement limité dans le temps qui doit permettre un gain. 

Lors d’une période difficile, une gestion RH souple et réactive est la clé pour transformer une période difficile en opportunité de renforcement et de développement.

Vous souhaitez faire appel à un DRH à temps partagé ?

Philippe Caquet, Président Boost’RH groupe

Philippe Caquet

Selon notre expert, une crise est une formidable opportunité de transformation et de création. Au contraire, la pire des erreurs serait de ne pas agir. Il faut oser, décider, communiquer et embarquer les équipes pour leur montrer qu’on prend les mesures nécessaires à la sauvegarde de l’activité.

Notre expert prend l’exemple d’une entreprise de microélectronique qu’il a accompagnée lors d’une baisse d’activité. La première urgence a été d’adapter les effectifs sans toucher aux permanents. Il a d’abord mis fin aux contrats intérimaires et gelé les embauches. Ensuite, pour les salariés en CDI, il a activé plusieurs leviers : chômage partiel, formation pendant les périodes creuses, et même des prêts de personnel à d’autres entreprises locales. C’est une solution gagnant-gagnant : l’entreprise limite sa masse salariale, les salariés conservent leur activité et leur salaire, et en prime, ils reviennent enrichis d’une nouvelle expérience.

Parmi les outils les plus efficaces, il cite également le Compte Épargne Temps (CET) qui permet de stocker les heures supplémentaires lors des pics d’activité et de piocher dans ce stock d’heures lors des baisses. Cela évite les à-coups brutaux et aide même à gérer la trésorerie. Il faut toutefois anticiper les provisions en cas de départ.

Le rôle du RH, en période difficile, ne se limite pas à gérer l’existant. Il doit préparer la reprise. Il faut éviter que les équipes ne se désengagent. Quand la reprise arrive, on doit pouvoir relancer la machine rapidement, sans être pris de court. Cela suppose d’avoir formé les bonnes personnes, maintenu un certain rythme (par exemple en réorganisant les équipes en 2×8 au lieu de 3×8), et redonné de la perspective. 

Dans ce contexte, le RH à temps partagé est une solution souple et économique. Le chef d’entreprise n’a pas toujours les bons réflexes ou le recul nécessaire pour répondre à la situation. Le RH à temps partagé arrive avec une boîte à outils, une neutralité précieuse dans les décisions sensibles et une capacité à proposer des solutions immédiatement activables. Et si l’entreprise a déjà un RH, il apporte du renfort, un œil neuf, et peut challenger la direction.

Pour résumer

En 3 Questions

  • Quelles sont les stratégies RH possibles en temps de crise ?

    Les stratégies RH en temps de crise incluent l’ajustement des effectifs (chômage partiel, réduction du temps de travail), l’optimisation de l’organisation (annualisation du temps de travail, CET) et la mise en place d’une politique de rémunération flexible (primes sur objectifs, épargne salariale). L’objectif est de réduire les coûts tout en préservant l’engagement des salariés.

  • Comment réduire la masse salariale sans licencier lors d’une baisse d’activité ?

    Pour éviter les licenciements, les entreprises peuvent recourir à des mesures comme le passage à temps partiel, la modulation du temps de travail, la suppression de primes obsolètes ou encore la mise en place d’un chômage partiel financé par l’État. La négociation avec les salariés et les représentants du personnel est essentielle pour garantir l’acceptation de ces mesures.

  • Pourquoi faire appel à un RH en temps partagé en période incertaine ?

    Un RH à temps partagé permet aux PME d’accéder à une expertise en gestion de crise sans supporter le coût d’un salarié à plein temps. Il aide à mettre en place des solutions adaptées, à sécuriser les aspects juridiques et à piloter les ajustements RH nécessaires pour traverser la période creuse et préparer la reprise.